Femmes avocates et droits des femmes : les pionnières qui ont ouvert la voie à l’égalité dans la justice
De la conquête du droit à plaider à la défense des libertés fondamentales, ces avocates ont fait du droit un puissant levier d’émancipation.
Ouvrir les portes d’un tribunal n’a pas toujours été une évidence pour les femmes. Longtemps écartées de la profession, certaines ont pourtant choisi de transformer la robe en symbole de combat, en outil de justice et d’émancipation. De Jeanne Chauvin, première avocate française, à Gisèle Halimi, figure majeure du féminisme, en passant par Shirin Ebadi, Gloria Allred ou Flavia Agnes, leurs parcours ont mêlé défense des droits et engagement pour l’égalité. Grâce à elles, la justice a changé de visage. Et si, aujourd’hui, les femmes sont majoritaires dans la profession, l’égalité réelle reste à conquérir. Leur héritage, puissant et inspirant, continue d’éclairer les luttes d’aujourd’hui.
À retenir
Ces avocates, parfois politiques, parfois militantes, ont chacune porté des combats qui ont transformé le droit et la conscience collective.
Parmi leurs contributions les plus importantes :
- l’ouverture de la profession juridique aux femmes (Jeanne Chauvin)
- la défense du droit à l’IVG et la lutte contre les violences (Gisèle Halimi, Simone Veil)
- la mobilisation juridique internationale pour les droits humains (Shirin Ebadi)
- les actions contre le harcèlement, la discrimination (Gloria Allred)
- la défense des femmes dans les sociétés fortement inégalitaires (Flavia Agnes)
Ces figures montrent que le droit peut être un instrument de changement social profond.
Pourquoi ces avocates sont-elles si influentes ?
Derrière chacune de ces femmes, il y a un combat qui dépasse la sphère juridique. Elles ont utilisé le droit non seulement comme outil de défense, mais aussi comme vecteur de transformation sociale. Qu’il s’agisse de rendre visible une injustice, de faire évoluer une législation ou de changer une mentalité, leur force réside dans leur capacité à conjuguer expertise juridique et militantisme.
Leur influence s’exerce à plusieurs niveaux :
- Symbolique : elles sont devenues des modèles d’identification pour les nouvelles générations.
- Politique : elles ont influencé des lois, voire porté elles-mêmes des projets de réforme.
- Pédagogique : elles ont formé, inspiré, soutenu des collectifs, des ONG, des victimes.
Jeanne Chauvin (1862‑1926) : la première femme à plaider en France
Jeanne Chauvin est souvent considérée comme la première femme à avoir obtenu le droit d’exercer la profession d’avocate en France.
- Contexte : elle fut l’une des premières femmes à obtenir une licence de droit (en 1892) mais se heurta à des obstacles législatifs pour plaider.
- Combat juridique : elle fit campagne activement pour que la loi change, plaidant que les femmes avaient aussi leur place dans la profession juridique.
- Impact : son action contribua à faire évoluer le cadre légal afin de permettre aux femmes d’exercer comme avocates en 1900.
Gisèle Halimi (1927‑2020) : l’avocate qui a fait du droit une arme féministe
Gisèle Halimi est une figure emblématique du féminisme juridique en France.
- Parcours : née en Tunisie, avocate, militante et écrivaine.
- Affaire Bobigny (1972) : elle défend une jeune fille ayant avorté après un viol ; ce procès est souvent pointé comme un moment clé de la mobilisation pour la légalisation de l’IVG.
- Actions : elle fonda l’association « Choisir la cause des femmes » pour promouvoir l’égalité juridique et sociale.
- Héritage : son engagement inspira des générations de juristes et actrices du droit qui continuent de structurer le débat sur les droits des femmes.
Shirin Ebadi (née en 1947) : une juriste au service des droits humains
Shirin Ebadi est une juriste iranienne, reconnue internationalement pour son combat en faveur des droits de l’homme, et en particulier des droits des femmes.
- Résistance et exil : elle a été confrontée à de fortes pressions dans son pays faute de reconnaître les droits fondamentaux des femmes.
- Prix Nobel de la paix (2003) : elle est la première femme musulmane à recevoir ce prix, notamment pour ses travaux en faveur de la justice sociale.
- Actions : elle a défendu victimes de violences, enfants, femmes discriminées, menacées par des lois injustes.
- Impact global : son activité dépasse le cadre national, et elle est souvent citée dans les débats sur les droits humains dans les pays en crise.
Gloria Allred (née en 1941) : la voix des victimes face aux puissants
Gloria Allred est une avocate américaine très médiatisée, reconnue pour son plaidoyer en faveur des femmes dans des affaires de harcèlement, d’injustice et de discrimination.
- Cibles : harcèlement sexuel, discriminations, agressions, violations des droits civiques.
- Stratégie : elle utilise les médias, le procès public, et mobilise l’opinion pour amplifier ses actions.
- Impact : elle a changé la façon dont les affaires de violences sexistes sont perçues dans le débat public aux États‑Unis, entraînant des réformes judiciaires et médiatiques.
Flavia Agnes : défendre les femmes au cœur du patriarcat
Flavia Agnes est une avocate et militante indienne, active depuis les années 1980, spécialisée dans le droit de la famille, la violence domestique et la condition des femmes.
- Organisation Majlis : elle est cofondatrice de cette institution juridique et culturelle défendant les droits des femmes en Inde.
- Domaines d’action : divorces, violences domestiques, droits légaux de la femme dans un contexte culturel complexe.
- Effet : dans un pays où les normes sociales restent très patriarcales, son travail montre comment conjuguer tradition, droit et réforme.
Simone Veil (1927‑2017) : la conquérante du droit à l’IVG
Simone Veil n’a pas exercé comme avocate au sens strict, mais son parcours juridique, politique et son action militante font d’elle une figure incontournable dans la défense des droits des femmes.
- Parcours : après son diplôme, elle a orienté sa carrière vers la magistrature, mais son engagement en tant que ministre et femme politique l’a placé au cœur des combats juridiques.
- Loi Veil (1975) : portée par elle, cette loi légalisa l’interruption volontaire de grossesse en France, face à une forte opposition politique et sociale.
- Mandats européens : première femme présidente du Parlement européen, elle défendit la dignité humaine, les droits des femmes et les politiques sociales au niveau international.
- Héritage : son nom reste synonyme de conquête du droit à disposer de son corps, d’avancée féministe institutionnelle, et d’un exemple moral et politique.
Avocate, un métier encore inégalitaire ?
Même si le nombre de femmes avocates dépasse aujourd’hui celui des hommes en France (plus de 56 % selon le CNB en 2023), des inégalités persistent :
- Rémunérations inférieures de 20 à 25 % en moyenne.
- Spécialisations genrées : les femmes sont surreprésentées dans le droit de la famille, sous-représentées dans le pénal et le corporate.
- Accès aux postes à responsabilité : les femmes restent minoritaires parmi les associés et bâtonniers.
Retrouvez notre article complet sur le sujet :
Les inégalités femmes/hommes dans les cabinets d’avocats
Les femmes avocates d’aujourd’hui : une relève engagée
La nouvelle génération d’avocates continue de faire du droit un levier d’émancipation et de transformation sociale. Elles s’attaquent aux grands enjeux de notre époque — violences sexistes, égalité des droits, libertés fondamentales — et prolongent l’héritage des pionnières en portant leurs combats dans les tribunaux comme dans l’espace public.
Parmi elles :
- Anne Bouillon, figure majeure de la lutte contre les violences conjugales et sexuelles, engagée pour une meilleure protection des victimes.
- Caroline Mécary, spécialiste du droit de la famille et des libertés individuelles, défenseure des droits LGBTQIA+ et de l’égalité des couples.
- Julie Couturier, bâtonnière de Paris, investie pour garantir un accès au droit plus équitable.
- Marie Dosé, connue pour ses prises de position sur la justice pénale et la défense des libertés publiques.
Ces avocates incarnent une génération qui ne se contente plus d’appliquer la loi : elles la questionnent, la bousculent et la font évoluer pour construire une justice plus juste et plus inclusive.
Conclusion
De l’ouverture de la profession aux femmes à la conquête du droit à disposer de son corps, du combat contre les violences sexistes à la défense des libertés fondamentales, ces avocates ont démontré que le droit, allié à l’engagement, pouvait profondément transformer les sociétés. Leur héritage dépasse les frontières et les époques : il inspire aujourd’hui une nouvelle génération qui poursuit ces luttes, adapte les combats aux enjeux contemporains et continue de faire de la justice un puissant levier d’émancipation et d’égalité partout dans le monde.
Points clés
- Les pionnières du barreau ont ouvert la voie aux femmes dans une profession longtemps réservée aux hommes.
- Les grandes figures du féminisme juridique ont permis des avancées majeures, comme la légalisation de l’IVG et la lutte contre les violences sexistes.
- Les avocates engagées ont utilisé le droit pour faire évoluer les lois, transformer les mentalités et défendre les droits humains à l’échelle mondiale.
- Les combats juridiques ont montré que la justice pouvait devenir un puissant levier de changement social et d’émancipation.
- La nouvelle génération d’avocates poursuit cet héritage en s’attaquant à des enjeux malheureusement toujours d’actualité comme l’égalité des droits, les libertés fondamentales ou la défense des minorités.
Articles Sources
- cnb.avocat.fr - https://cnb.avocat.fr/sites/default/files/cnb_rapportannuel-2023.pdf
- choisirlacausedesfemmes.org - https://www.choisirlacausedesfemmes.org/
- ewla.org - https://ewla.org/
- majlislaw.com - https://www.majlislaw.com/

