Blockchain : quelles perspectives pour les cabinets d’avocats ?

Le bitcoin et l’etherum sont des blockchain publiques. Il serait pourtant dommage de réduire leur technologie de fonctionnement au strict usage de la cryptomonnaie, notamment s’agissant de leur apport probatoire. Saviez-vous qu’une information déposée dans la blockchain peut avoir force probatoire en cas de litige ?

Certains s’inquiètent des différentes applications de cette technologie notamment des répercussions néfastes sur la vie privée et la circulation d’informations. Pourtant cette dernière présente entre autres l’avantage de démocratiser le concept de preuve numérique. Elle peut notamment avoir des conséquences sur les enjeux juridiques et donc impacter de la profession d’avocat. Ainsi exposé, il s’agit d’étudier ensemble le potentiel de ce futur pilier de l’écosystème numérique vis-à-vis de fonction de garant du droit.

blockchain avocats

Comment fonctionne la blockchain ?

Qu’est-ce que la blockchain ?

Techniquement, la blockchain consiste en l’agrégation de différents mécanismes : peer-to-peer, haschage, gouvernance, registre, smart contract et oracle (en tant que programme externe à la blockchain).

De manière plus pratique, cette technologie fonctionne comme une base de données décentralisée dont on ne peut modifier les inscriptions. Elle offre ainsi un transfert de valeur numérique. Jusque-là, une pièce jointe – envoyée d’un point A à un point B – se retrouvait ainsi dans les deux points.

La blockchain innove en ce qu’elle permet un transfert réel de la valeur envoyée. En cela, elle bouleverse les modalités ancestrales d’organisation du pouvoir et du droit. Initialement, les cryptomonnaies ont été inventées afin d’éviter les pouvoirs régaliens liés à l’émission de la monnaie lors de la crise financière de 2008.

Une plus grande maîtrise des données ?

La répercussion principale de la blockchain nous semble être celle de s’arroger un plus grand droit de propriété sur des données en tant qu’actif immatériel.

Les consommateurs se retrouvent ainsi en mesure de protéger leur vie privée, voire de rémunérer l’usage opéré autour de leurs données, leur conférant ainsi un droit de protection ou de commercialisation.

A noter:

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Cette meilleure distribution et maîtrise des données apporte plus de concurrence et d’innovation.

Rappelons que la phase créative qui précède le brevet, la zone de création et d’innovation est depuis toujours à risque. La blockchain y pallie en constituant des preuves à chaque avancée de la démarche créative de l’auteur.

Voyons-y là une solution opérationnelle sans intermédiation – donc à faible coût en cas de contentieux – qui peut comporter un descriptif de l’innovation, du savoir-faire ou de la création dans un document qui est par la suite converti par un algorithme (le SHA256, aussi appelé empreinte).

C’est d’ailleurs cette dernière empreinte qui sera ancrée dans la blockchain.

Encadrer la pratique des Initial Coin Offering ?

L’ICO est une nouvelle méthode de financement de levée de fonds via la démultiplication d’investisseurs. Elle fait fureur outre Atlantique mais peine à voir le jour en Europe.

En pratique, il s’agit de proposer l’achat de jetons cryptographiques (appelés tokens) en échange de crypto-devises ou de la réalisation d’actions en faveur du projet qui vise à financer cet appel de fonds.

Ces jetons ont différentes fonctions. Ainsi, ils peuvent consister en l’accès à un usage ou à un service numérique, représenter une valeur patrimoniale (droit à des revenus, dividendes, etc.) ou être assimilable à une cryptomonnaie (certains sont frileux à l’idée d’un tel emploi).

La contrepartie de ces jetons est définie dans un document d’information à destination des investisseurs, appelé white paper. La rédaction de ce dernier document a un rôle essentiel et en cela est une manne potentielle intéressante pour tout avocat aguerri aux NTIC. Il s’agit – entre autres – de respecter la qualification des tokens en cause et l’information des investisseurs sur les risques afférents.

Les risques identifiés liés à la blockchain ?

Si la blockchain ouvre de nouvelles perspectives pour le métier d’avocat, notamment la sécurisation des données pour une utilisation juridique, la technologie n’en est qu’à ses débuts.

Renforcer l’aspect probatoire d’une blockchain encore aveugle ?

La technologie nécessiterait idéalement l’intervention ponctuelle du législateur s’agissant notamment de l’opposabilité d’un acte privé (cf article 1377 du Code civil) et l’opposabilité d’un écrit électronique (cf article 1316-1 du Code civil).

Des améliorations sont donc à apporter concernant l’identification, l’intégrité et l’enregistrement de la blockchain et les enjeux liés par ce biais notamment au blanchiment d’argent sont non négligeables.

De manière plus pratique, il s’agirait par-là même de renforcer le concept du smart contract. Ce dernier contrat consiste en un algorithme qui va mettre en face d’une situation, une réponse.

Entendez par là qu’il peut par exemple s’appliquer en matière d’assurance « paramétrique », soit par exemple une indemnisation directe et automatique en cas de retard sur un vol aérien.

Pour ce faire, nécessité est faite de mettre au point la une technologie réunissant un algorithme, un fournisseur de données sur les horaires réels des vols, un moteur dit de pricing (qui modélise le montant de l’indemnisation) et enfin un prestataire de paiement. C’est le fonctionnement-même du smart contract.

A noter:

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Il reste qu’à ce jour, il n’est pas encore suffisamment efficient en ce qu’il manque d’automatisation. Toute la chaîne entre le constat du retard et le versement de l’indemnisation n’est donc pas autonome et nécessite l’intervention d’oracle – en tant que tiers – pour techniquement entrer la donnée d’heure d’arrivée constatée.

Dès lors ainsi exposé, l’enjeu lié au smart contract est nécessairement lié au rôle du tiers de confiance qui, nécessairement, sera développé par l’entité qui doit réaliser la prestation donc partie prenante non dotée d’une neutralité objective extérieure. Il faut accorder aujourd’hui au fonctionnement du smart contract une présomption de confiance dans le développeur de l’algorithme mais aussi dans l’oracle.

Pourquoi renforcer le rôle du tiers de confiance ?

Par essence, la blockchain – en tant que protocole – n’a pas de responsable de traitement. En revanche ses participants – les services qui fonctionnent sur la blockchain – peuvent être responsables en fonction des cas. Le R.G.P.D. s’applique à la blockchain dès lors qu’on parle de données personnelles et de personnes physiques.

Comment ainsi donc désigner un responsable de traitement des données dans un système par essence décentralisé ? Qu’en est-il du règlement concernant le transfert des données ou encore du droit de rectification, du droit à l’effacement et, enfin, du droit à la conservation limitée des données ? Quelle est la place du tiers de confiance nécessaire au sein d’une blockchain privée ?

Dans les solutions privilégiées par la CNIL, le responsable de traitement répond ainsi de ses choix et doit prendre en compte la conformité des projets le plus en amont possible.

Points clés à retenir :
  • La blockchain apparaît certes comme une technologie du futur mais elle bouleverse par-dessus tout le système d’authentification des actes et  nécessite – plus qu’une sensibilisation aux opportunités qu’elle offre – de profonds renforcements.
  • Qu’il s’agisse du fonctionnement du smart contract ou du responsable de traitement, saisissons-nous de l’apparition et l’encadrement juridique du rôle de tiers de confiance.
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