Juriste et conseiller stratégique : les deux facettes de l'avocat

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Dans le monde des affaires, la gestion des grands contentieux a grandement évolué et l’idée de voir des avocats troquer leur robe contre un costume de conseiller stratégique est de plus en plus répandue !

Il est vrai que ce sont ceux dont les conséquences financières ont un impact significatif sur les résultats d’un groupe qui sont susceptible d’être réclamés par un client, ceux qui peuvent entraîner pour lui un changement de stratégie, ou affecter durablement sa réputation. L’essor de ces contentieux est dû, sans doute, à l’intensité accrue des échanges commerciaux, et à une économie qui s’est ouverte, et souvent affiliée, aux opérations internationales et financières.

L’ouverture de procédures judiciaires et réglementaires dans de nombreux pays a été provoqué par les démarches isolées de quelques rares traders. Pour chaque banque concernée, des dizaines de membres des services d’inspection internes, d’avocats et d’experts ont dû travailler en équipe unie et sans frontière.

Plus d’interventions

Les litiges classiques, issus des contrats internationaux, n’ont pas échappé à cette complexité. Des opérations d’investissement, la création de "joint ventures" donnent souvent lieu à un enchevêtrement de contrats qui sont soumis à des lois et à des juridictions différentes. Il faut reconnaître que de tels contentieux ne sont pas toujours stériles pour la vie de l’entreprise, certains sont au contraire décisifs pour assurer le succès d’une stratégie industrielle ou financière.

Ainsi, l’arbitrage engagé par Carlyle pour prendre le contrôle d’Otor ou celui engagé par le Groupe Casino pour défendre ses droits d’actionnaire dans sa filiale brésilienne ont certainement joué un rôle significatif dans la stratégie de ces entreprises. Dans cette perspective, les avocats spécialisés interviennent plus tôt qu’auparavant dans la gestion de ces litiges, car leurs clients ont pris conscience de leur importance et sont prêt à faire confiance.

La grande différence entre hier et aujourd’hui est que l’avocat n’intervenait qu’au stade où la procédure contentieuse était devenue inéluctable. Puis, les sociétés ont fait davantage appel à leur conseil dans le cadre de la phase pré-contentieuse – qu’il s’agisse des échanges préalables au lancement d’une procédure ou de l’enquête précédant une éventuelle procédure de sanction. Certains groupes font même appel à des avocats spécialistes en contentieux plus en amont encore, en guise d’anticipation, au moment où la naissance d’un contentieux n’est qu’éventuelle.

Coopération renforcée

Les objectifs actuels ont été compris par les avocats : la fusion entre fonction de conseil et mission de conseiller. Cette mission consiste à mettre en avant la compréhension de l’avocat concernant les intérêts stratégiques du client et les potentielles conséquences du litige en cause sur son activité et sa réputation.
Naturellement, la compréhension de l’avocat passe par un approfondissement du secteur d’activité de l’entreprise, de son mode de fonctionnement et même de son histoire passée.

Le dialogue et la coopération avec les directions juridiques et financières, mais aussi avec les opérationnels du groupe est indispensable. Cette familiarité est une condition nécessaire pour que l’avocat puisse conseiller au mieux son client, avec l’aide précieuse des banquiers d’affaires ou des conseils en communication.

L’avocat, quant à lui, doit savoir guider son client, le cas échéant, vers une conciliation, une médiation ou une transaction, et ne pas craindre parfois de s’opposer à lui, en le dissuadant d’emprunter des chemins hasardeux. Dans un sens, l’entreprise attend de son conseil qu’il renoue avec sa vocation initiale d’avocat, parfois oubliée. Il n’est pas seulement un expert technique, mais un conseiller personnel, que les Anglais nomment "trusted advisor".