Victime de nuisances sonores, quels sont mes recours ?

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Les nuisances sonores sont sanctionnées par le Code de la santé publique, car elles sont à l’origine de troubles de voisinage et de problèmes de santé chez l’homme. Sujet récurrent de litige entre voisins, les victimes se sentent parfois démunies. Si vous avez un voisin bruyant, vous disposez de plusieurs recours. Demandez conseil à un avocat qualifié en droit pénal pour plus d’éclaircissement à ce sujet. Les réponses aux questions fréquentes sur les nuisances sonores.
Victime de nuisances sonores, quels sont mes recours ?

Que dit la loi sur les nuisances sonores ?

Petit rappel historique : en 1992, la première loi contre les nuisances sonores est née, puis a été progressivement renforcée et intégrée au Code de l’environnement et dans le Code de la santé publique. Au juridique, retenons la définition du Code de la santé publique, article R1336-5 :

Aucun bruit particulier ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité, porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’homme, dans un lieu public ou privé .

En matière de nuisances sonores, la jurisprudence retient également que « nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ».

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Les nuisances sonores en chiffres 

Une enquête menée par le baromètre Qualitel prouve que les nuisances sonores sont une cause évidente de conflits de voisinage. En 2017, 69 % des français déclarent avoir de mauvaises relations avec leurs voisins à cause du bruit, 22% habitent une maison, et 42 % un appartement. Pour éviter les troubles de voisinage, 35 % des occupants d’appartements ont écourté une fête, limité le nombre d’invités, ou ont complètement renoncé à célébrer un événement chez eux. D’autres comportements ont aussi été modifiés pour éviter les tensions entre voisins. Par exemple, 70 % baissent le son de leur télévision ou de leur radio.
Les bruits les plus gênants en appartement sont :

  • Les fêtes et soirées : 32 %
  • Les éclats de voix : 29 %
  • La circulation : 24 %

Quand considère-t-on un bruit comme une nuisance sonore ?

Les troubles au quotidien font partie de la vie en collectivité. Cependant, dès lors qu’un certain seuil auditif est dépassé, on considère qu’il y a trouble anormal du voisinage. Les nuisances sonores constituent ainsi une infraction, quand elles sont commises en dehors des limites définies par la loi. Avant de se pencher sur ces limites, il convient de définir les types de bruits pouvant être qualifiés de nuisances sonores.

Quels types de bruits sont mis en cause ?

Les bruits de voisinage, aussi appelés bruits de comportements, résultent du comportement :

  • D’une personne : bruits de pas, cris d’un voisin…
  • D’un animal : aboiement sans arrêt, chant du coq …
  • D’un objet : appareil ménager, chaîne hi-fi, bricolage, travaux…
À noter :
La notion de trouble anormal de voisinage dépend du contexte auquel il appartient. Par exemple, la situation est considérée comme normale pour un coq qui chante tous les matins en milieu rural. Il revient au juge d’apprécier s’il y a infraction ou non.

Quelles conditions permettent d’établir un trouble de voisinage ?

Certaines conditions doivent être remplies pour caractériser un trouble de voisinage causé par des nuisances sonores :

  • La relation de voisinage doit exister entre l’auteur et la victime. Par conséquent, leurs logements doivent être suffisamment proches.
  • Le trouble doit causer un préjudice à la victime (santé ou jouissance paisible).
  • Un lien de causalité doit exister entre le trouble et le préjudice.
  • Le trouble doit être anormal et constituer une gêne pour le voisinage.

La réunion de ces quatre conditions permet d’engager la responsabilité de l’auteur du trouble anormal de voisinage.

À quelle heure peut-on faire du bruit ?

Contrairement aux idées reçues, les nuisances sonores ne sont pas interdites à des heures fixées par la loi. En effet, les bruits de comportements et les bruits professionnels sont déterminés selon des tranches horaires précises, mais celles-ci  permettent surtout de distinguer le tapage diurne du tapage nocturne.

Le tapage diurne

On parle de tapage diurne lorsque les bruits de comportement qui troublent le voisinage ont lieu au cours de la journée. En référence à la définition du Code de la santé publique à l’article R1336-5, le bruit ne doit pas être répétitif, intense et durable. S’il trouble la tranquillité d’autrui entre 7h et 22h (article R1336-7 du code de la santé publique), et dépasse un seuil auditif fixé à 5 décibels pondérés A, l’infraction est constituée. Néanmoins, d’autres dispositions s’appliquent aux bruits professionnels.

Pour les travaux légers, il est permis de faire du bruit :

    • Du lundi au vendredi entre 8h et 12h, puis entre 14h à 19h 30
    • Le samedi entre 9h et 12h, puis entre 15h et 19h
    • Le dimanche et les jours fériés de 10h à 12h

Pour les travaux lourds, les bruits sont permis :

    • Du lundi au samedi entre 7h et 20h
    • Mais interdits le dimanche et les jours fériés

Si vous devez réaliser des travaux en journée, comme bricoler, jardiner, travailler sur un chantier ou autre, la loi ne vous l’interdit pas, mais les bruits occasionnés ne doivent être ni répétés, ni intenses ou ni durer longtemps. En cas de dérive, des sanctions peuvent s’appliquer.

Le tapage nocturne

Le tapage nocturne se distingue du tapage diurne, car il concerne particulièrement les bruits de voisinage qui ont lieu de nuit, de 22h à 7h du matin. Si les articles R 1336-5 et R 1336-7 du Code de la santé publique sont spécifiques aux nuisances sonores au sens large, celles qui sont commises en pleine nuit sont définies par l’article R 623-2 de « bruits ou tapages injurieux ou nocturnes troublant la tranquillité d’autrui ».

Dans ce cas, l’infraction est constituée sans que le bruit soit répété, intense ou dure dans le temps. N’importe quel bruit qui trouble la tranquillité du voisinage entre le coucher et le lever du soleil constitue un tapage nocturne. Pour être qualifié comme tel, l’auteur doit être conscient du trouble engendré sans prendre les mesures nécessaires pour y mettre fin. Autrement dit, s’il commet des nuisances sonores sans en être conscient, l’infraction n’est pas présumée et aucune sanction ne lui est applicable.

Victime de nuisances sonores, qui dois-je contacter ?

Victime de nuisances sonores, vous ne savez pas vers qui vous tourner ? Voici les personnes et autorités compétentes que vous pouvez contacter.

  • Le maire : garant de la tranquillité des habitants de sa commune, il a le devoir de lutter contre le bruit, par exemple avec un arrêté municipal qui encadre horaires pendant lesquels les travaux de jardinage ou de bricolage peuvent être effectués. L’avertir des troubles de voisinage dont vous êtes victime lui permet de prendre les mesures nécessaires.
  • Les forces de l’ordre (police municipale ou police judiciaire) : leur intervention consiste à procéder à une constatation des nuisances sonores, ainsi qu’à une verbalisation de l’auteur si celles-ci sont constatées.
  • Le syndic de copropriété de l’immeuble : il doit faire respecter les règles de copropriété en matière de nuisances sonores.
  • Le propriétaire du logement : si le contrat de location comporte une clause résolutoire concernant les nuisances sonores, il peut faire jouer la carte de la résiliation du bail en votre faveur.
  • Le conciliateur en justice : cette démarche est indispensable avant de passer par la procédure judiciaire. Il intervient dans la conciliation pour solutionner le problème à l’amiable.
  • L’avocat : à part ses rôles de conseiller et de médiateur, il peut aussi vous représenter devant le tribunal.
Bon à savoir :
Pour les logements en copropriété, le propriétaire est tenu par l’obligation d’assurer la jouissance paisible de chacun de ses locataires. Le Code civil impose au locataire d’user de la chose louée de manière raisonnable (article 1728). Ainsi, si l’un d’entre eux est mis en cause pour nuisances sonores, le propriétaire a le droit procéder à l’expulsion, sans  être en défaut vis-à-vis du règlement de copropriété. Dans le contrat de bail, il peut également ajouter des clauses résolutoires en cas de trouble de voisinage, et procéder à la résiliation si celles-ci ne sont pas respectées.

Quels sont les recours à ma disposition ?

Vous disposez de plusieurs recours pour faire cesser les nuisances sonores et même obtenir réparation du préjudice subi.

Les démarches de conciliation

Si vous avez un voisin bruyant, la première chose à faire est de prendre contact avec lui pour discuter des nuisances sonores, afin de lui faire prendre conscience de la gêne occasionnée, et surtout d’essayer de trouver une solution à l’amiable pour y mettre fin.
Si les bruits persistent malgré cette première tentative, adressez-lui une lettre de mise en cause en recommandé avec accusé de réception. Cette lettre est une preuve des démarches que vous avez entamées si l’affaire devait être portée devant le tribunal.
Si nécessaire, vous pouvez également saisir une tierce personne comme un conciliateur en justice. Dans le cadre d’une location ou d’un logement en copropriété, l’intervention du propriétaire ou du syndic de copropriété peut aider à résoudre le problème.
Si toutes les démarches amiables n’ont pas permis de faire cesser les nuisances sonores, le recours à un avocat spécialisé en lutte contre le bruit permet de tenter de surcroît la conciliation, ou à défaut, d’étudier une stratégie pour un recours judiciaire

Le recours aux forces de l’ordre

Vous pouvez recourir aux forces de l’ordre, notamment à la police municipale, la police nationale ou la gendarmerie, pour faire constater les bruits de comportements qui vous gênent. Il s’agit d’une simple constatation à l’oreille, sans utilisation d’appareils de mesure spécifiques. À l’issue de leur constatation sur les lieux, un procès-verbal sera établi par les autorités, ainsi qu’une injonction de faire cesser les bruits. Sur le moment, l’auteur risque une amende forfaitaire de 68 euros qu’il devra payer dans un délai de 45 jours. S’il ne procède pas au règlement à temps, l’amende sera majorée à 180 euros.
L’auteur s’expose en cas de récidive, à une contravention de 3ème classe pouvant atteindre 450 euros, assortie d’une peine complémentaire comme la confiscation de l’objet ayant servi à commettre l’infraction (instrument de musique, chaîne hi-fi, etc.). Un constat d’huissier de justice est également envisageable si vous intentez l’action en justice. Même si son intervention est payante, elle présente un grand intérêt, car l’huissier peut recourir à l’utilisation de mesures acoustiques comme un sonomètre pour établir un constat, et constituer des preuves solides devant le tribunal.

Pour le cas de tapage nocturne, il suffit que les nuisances sonores soient perceptibles d’un logement à l’autre pour que l’infraction soit avérée, même si le bruit n’est ni répété, ni intense, ni durable.

Attention :
Si vous faites déplacer les forces de l’ordre à tort, sans aucune nuisance sonore avérée, vous risquez d’être condamné pour dénonciation calomnieuse. Par définition, la dénonciation calomnieuse est le fait de dénoncer une personne aux autorités compétentes pour des faits que l’on sait inexacts, même partiellement. La peine encourue est de 5 ans de prison assortie d’une amende de 45 000 euros.

La saisine du tribunal

En dernier recours, vous pouvez saisir le juge civil, à condition de réunir tous les éléments de preuve qui attestent que vous avez subi un préjudice. Comme preuves, vous pouvez avancer la lettre de mise en cause au premier contact établi avec votre voisin, le constat d’huissier, le procès-verbal des forces de l’ordre, un certificat médical, etc.

Attention, les preuves légales doivent avoir été obtenues sans fraude. Par exemple, vous ne pouvez pas filmer votre voisin à son insu et utiliser la vidéo contre lui.
Le juge peut condamner l’auteur de nuisances sonores à verser des dommages et intérêts. Le tribunal compétent dépend du montant de la réparation financière que vous souhaitez obtenir par rapport au préjudice subi :

    • Le tribunal de proximité pour une somme inférieur à 4 000 euros.
    • Le tribunal judiciaire pour une somme supérieure à 4 000 euros.
Attention :
Engager une procédure judiciaire de manière abusive vous expose à une amende d’un montant de  3 000 euros, ainsi que le versement de dommages et intérêts à la partie adverse, dans le cas où vous perdez le procès et qu’elle se retourne contre vous.

Les bruits font partie du quotidien, surtout lorsqu’on habite une grande ville ou un logement en copropriété. Il est toujours sage d’être modéré dans ses actions et de limiter au maximum les bruits  que ce soit en intensité ou en durée. Il faut mettre toutes les chances de son côté en revoyant par exemple l’isolation acoustique de son logement, en particulier si ce dernier est ancien.