Que recoupent les droits voisins du droit d’auteur ?

Marine Saudreau - Rédactrice juridique

Quels sont les droits voisins du droit d’auteur qui régissent l’interprétation d’une œuvre de l’esprit par un artiste-interprète ? Le droit voisin vise à établir des accords de licence entre une société de gestion qui la répartit entre l’artiste et le producteur de l’enregistrement. Est-il applicable à la presse sur Internet ?
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Le droit voisin mérite spécialement votre attention car il a fait l’objet d’une évolution importante depuis l’adoption d’une directive dite droits d’auteur par la Commission européenne. Il vise les personnes connexes du droit d’auteur qui exercent leurs droits indépendamment de ceux des auteurs et sans y porter atteinte. En quoi donc consiste-t-il et quels sont les droits qui lui sont attachés ?
Il nous semble aussi intéressant de voir son applicabilité sur Internet depuis le vote récent de cette directive puisque les agrégateurs d’information – Google Actualités ou les médias sociaux par exemple – seraient désormais tenus de négocier des accords de licence en application du droit voisin via le versement d’une licence.

Différents bénéficiaires autour d’un principe

Les bénéficiaires de droits voisins sont visés aux articles L211-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle (CPI) :

  • Les artistes-interprètes sont ceux qui participent à faire vivre une œuvre par la représentation, le chant, le récit ou l’exécution de toute autre manière d’une œuvre littéraire ou artistique, d’un numéro de cirque ou de marionnettes ;
  • Les producteurs de phonogrammes concernent les personnes (physiques ou morales) qui ont l’initiative et la responsabilité de la première fixation d’une séquence de son ;
  • Les producteurs d’idéogrammes (sonorisés ou non) sont les personnes (physiques ou morales) qui ont l’initiative et la responsabilité de la première fixation d’une séquence d’images ;
  • Les entreprises de communication audiovisuelle désignent les organismes.

Le titulaire d’un droit voisin peut demander en urgence une saisie-contrefaçon, procédure préventive permettant de faire cesser l’atteinte à ses droits. Une telle atteinte peut être sanctionnée civilement et pénalement par le versement de dommages et intérêts en réparation d’un préjudice prouvé.

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Des protections attachées au droit voisin

Deux protections sont attachées au droit voisin et elles consistent en un droit moral et un droit patrimonial :

  • Le droit moral désigne le respect du nom et de la qualité accordée à l’artiste-interprète dans toute utilisation pour faire connaître la paternité de son œuvre. Il a également droit au respect de son interprétation qu’on ne peut modifier sans son autorisation. Ce droit moral est perpétuel, inaliénable, imprescriptible et se transmet aux héritiers de l’interprète ou du producteur ;
  • Le droit patrimonial ne peut faire l’objet d’une cession. Il offre à l’artiste-interprète la possibilité d’autoriser ou non la reproduction, la mise à disposition au public par la vente, l’échange ou la location, ou la communication au public de sa prestation.

En contrepartie, l’artiste-interprète ou le producteur a droit à une rémunération pour la diffusion de son travail.

Durée de protection attachée au droit voisin

La durée de protection légale est de 50 ans à compter du 1er janvier de l’année civile à partir de l’interprétation de l’œuvre pour les artistes interprètes sauf si, durant cette période, il y a eu fixation de l’interprétation dans un vidéogramme ou un phonogramme avec une mise à disposition du public.
Il est important de savoir si l’œuvre est tombée dans le domaine public ou non. Le mieux dans ce cas est de se tourner vers un avocat en droit de la propriété intellectuelle. Il déterminera la durée adéquate attachée – globalement de 50 ans ou de 70 ans – selon les cas. Il analysera quand l’œuvre a fait l’objet d’une diffusion à la radio et quel a été son usage, privé ou non.

Applicabilité du droit voisin sur Internet

La directive dite droit d’auteurs concerne le droit voisin. Son objectif global est de parvenir à une meilleure répartition de la valeur entre les différents acteurs d’Internet, notamment entre les créateurs de contenus et les plateformes qui diffusent les chansons, vidéos et articles. Elle vise ainsi les agrégateurs d’informations comme Google Actualités ou les médias sociaux comme Facebook en ce qu’ils créent et diffusent des articles sans aucune contrepartie versée aux éditeurs.
La problématique de cette directive qui a fait couler beaucoup d’encre était de savoir si le droit voisin peut s’appliquer aux GAFA (expression désignant les géants du web) moyennant une redevance versée aux médias, faisant ainsi écho au modèle de la SACEM dans le monde de la musique.

Quel avenir pour la directive droit d’auteurs ?

Cette directive sensibilise l’opinion publique à l’importance du droit voisin et en cela elle est une réelle avancée en la matière. Elle doit maintenant être transposée dans le droit national de chaque état-membre et faire l’objet de discussions parlementaires.
Il sera ensuite nécessaire de créer des sociétés de gestion collective des droits puis de négocier avec les GAFA. La directive donne les bases juridiques pour mener les pourparlers. Il est encore trop tôt pour se prononcer si le versement sera à l’article ou à un forfait annuel. Les avocats spécialisés en droit de la propriété intellectuelle suivront de près l’applicabilité de ce texte.
Que l’on prône un Internet libre ou une lutte contre des GAFA, cet accord adopté par les ministres de l’Union européenne se révèle être un vrai tour de force.